mardi 20 novembre 2007

Le présent de Calcutta

Article publié dans l'hebdo indépendant Accès Laurentides

Bip. Bip. Bip.

Satané réveille-matin. Décidés de capter les premières agitations de Kolkata (Calcutta) avec notre fidèle caméra vidéo, nous quittons notre hôtel aux aurores avec du sommeil plein les yeux. Une ville en ébullition s'offre à nous.

J'appuie sur RECORD.

La majeure partie de l'action de la cité se concentre sur ses trottoirs. On y travaille, on s'y presse, on y prie, on y mange, on y fait ses besoins naturels, bref, on y vit! En ce matin comme les autres, certains s'activent à installer leurs kiosques, alors que d'autres, fraîchement débarqués de la campagne, s'apprêtent à quitter leur camping urbain pour chercher du travail dans cette jungle déjà saturée de main d'oeuvre.

Parralèle à la misère humaine, une foule de riches hommes d'affaires se dirige vers leurs bureaux climatisés. Sur la chic Parc street, les édifices beaux mais défraîchis nous rappellent, par leur architecture, le passage des Brittaniques dans cette ancienne capitale de leur colonie. Des femmes décorées d'or se pressent vers les boutiques de tissus luxueux pour se faire tailler un sari en vue du mariage d'une cousine éloignée. Kolkata est LA cité de la mode au pays.

Ici, les extrêmes se conjugent. Nul part ailleurs dans le monde, les écarts de richesses sont aussi flagrants.

«Rick-shaw, sir!» Un homme attelé à une carriole tel un cheval nous interpèle. Il frappe une clochette sur le siège de son véhicule pour nous sommer d'y prendre place. Kolkata est le dernier endroit sur terre où le travail de pousse-pousse humain subsiste. Les associations de droits humains frissonnent d'ailleurs à l'idée que des milliers d'Indiens le pratiquent encore. Pourtant, le jour où le métier sera complètement aboli, d'innombrables familles perdront leur unique source de revenue. Dilemme moral.

Étourdis par la faune urbaine, nous posons un instant notre caméra. Nous achetons une bonne crème glacée à la vanille dans un de ces petits kiosques ambulants. Aussitôt, quelques enfants forment un cercle autour de nous. «Ice cream, please!» Après deux mois en Inde, la triste vérité est que nous nous sommes construits un mur pour ne pas craquer devant la pauvreté. Mais aujourd'hui, nous fondons comme notre crème glacée devant ces regards insistants et décidons de partager le plaisir de notre gourmandise. Un délice glacé pour tout le monde, c'est notre tournée! Leurs yeux plein de bonheur valent bien les quelques roupies que nous venons de dépenser.

Nous les quittons dans un brouhaha de «thank you» bien sentis, puis entrons dans un café internet, question de se reconnecter avec ce qui se passe au Québec. Quelques nouveaux courriels, dont un qui porte comme sujet «Échange de cadeau»: Salut tout le monde, comme à chaque année, nous organisons l'échange de cadeaux de Noël. Nous avons pensé que cette année, chacun pourrait faire une liste de suggestions pour ne pas se retrouver avec un cadeau qu'il ne veut pas...Budget:30$

Je relis la dernière phrase avec incrédulité: (...) pour ne pas se retrouver avec un cadeau qu'il ne veut pas!!! Le concept m'apparaît incongru. Un cadeau, c'est un cadeau! J'ai soudain envie de répondre à mes amis qu'ils jouent aux enfants gâtés, que les cadeaux ça ne se commande pas, que s'ils voyaient les jeunes qui crèvent dans les rues ici ils accepteraient le premier présent avec la plus grande gratitude... Mais, je m'arrête. Mes amis sont au Québec. Je suis en Inde.
Je sais qu'à mon retour, je vais être confrontée à ce bouleversement de valeurs qui est à la base de ce merveilleux voyage. Ne pas mépriser les autres. Partager mes apprentissages. Ouf! Notre retour prévu pour Noël risque d'être notre plus grand choc de l'Inde...

3 commentaires:

Dan a dit…

Salut à vous deux,

Contente de voir que tout va bien. Je me demandais justement quelles cadeaux feraient plaisir à Noel à vous deux grands voyageurs.
Pour moi mon plus beau cadeau sera de vous voir revenir avec plein d'aventures à raconter et (essayer de)comprendre en quoi cette aventure à changer votre façon de vivre.

Cette année les cadeaux de Noel seront de passer du temps ensemble dans des endroits et avec des gens que vous aimez, j'en suis certaine.

J'attends votre retour avec impatience et essaierai de ne pas bousculer le choc de votre retour avec toute notre abondance.

chacha a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
chacha a dit…

Bonjour, je m'appelle Charlotte et j'ai vraiment aimé les choses qu'on a fait à Génie art avec Sandra sur le thème de l'Inde.

bye!